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Le fait homosexuel, largement représenté, exposé et débattu dans la société, nous interpelle même si l’on en parle peu dans l’Église adventiste des territoires de l’Union franco-belge et de la Fédération de la Suisse romande et du Tessin. En l’absence de statistiques résultant d’enquêtes sérieuses, il est difficile de citer des pourcentages moyens de personnes homosexuelles (1) par rapport au nombre de membres inscrits sur les registres de l’Église. Il est certain que des homosexuels, déclarés ou non, fréquentent nos Églises locales.
Indépendamment même de son importance numérique, l’existence de cette incontournable réalité humaine pose des questions délicates, difficiles, complexes, souvent douloureuses pour tous. Pour les homosexuels eux-mêmes, spécialement lorsqu’ils aspirent à une vie spirituelle partagée, pour leurs familles, leurs amis, pour leurs frères et sœurs en Christ, pour les communautés locales, pour l’Église. Du côté de celle-ci, l’ignorance, le déni ou le rejet ne sauraient être des positions satisfaisantes ; mais quelle attitude adopter, tant au niveau personnel qu’ecclésial ?
Le présent texte sur l’accueil des personnes homosexuelles (2) ne se veut ni dogmatique, ni normatif. C’est une introduction (3), un texte de sensibilisation visant à rompre un silence gêné ou mal informé, à ébaucher quelques pistes de réflexion et à poser le problème de manière aussi objective, aussi équilibrée que possible. Le but n’est pas de justifier des comportements, mais d’inviter chacun, sous la conduite de l’Esprit et des enseignements de la Parole de Dieu, à approfondir sa réflexion et à tendre vers des relations plus fraternelles.
L’idéal biblique, établi à la création et rappelé par Jésus (4), est le couple monogame hétérosexuel. L’éloignement de Dieu a produit, dans de nombreux domaines, dans ce « monde qui soupire et souffre (5) », bien des conduites, volontaires ou non, en désaccord avec ce plan divin. Certaines, comme la polygamie, ont été momentanément tolérées, par mansuétude de la part de Dieu ; ce qui, cependant, n’a pas été sans engendrer d’abondantes difficultés. D’autres, peut-être plus dérangeantes, ont de tout temps suscité l’opposition, c’est le cas des relations homosexuelles.
La plupart des personnes homosexuelles que nous avons rencontrées n’ont pas choisi de l’être (6). La découverte de cette différence, d’origine complexe et encore mal connue, est généralement pour eux l’occasion de désarroi, de déni, de souffrance. Beaucoup, spécialement lorsqu’ils sont chrétiens, se forcent, soit par motif de conscience, soit pour rester dans la norme sociale ou ecclésiale, à un comportement hétérosexuel. Ils tentent de changer, le demandent avec instance à leur Père céleste, parfois se marient, ont des enfants ; mais, pour certains et à des degrés divers, grand est leur sentiment de se mentir à eux-mêmes, de mentir aux autres. Maintiennent-ils cette position socialement et religieusement correcte mais psychologiquement et spirituellement dévastatrice ? Ils sont alors conscients de n’être pas eux-mêmes. Décident-ils – cela est difficile et demande bien du courage – d’être authentiques et de ne plus cacher ce qu’ils sont vraiment (ce qu’on appelle le coming out) ? Ce sont alors des déchirements familiaux, sociaux, ecclésiaux et très souvent des mépris, des sarcasmes, des jugements, des exclusions généralement choisies pour éviter le scandale, ou, pire encore, subies.
Face à cette situation, que peut l’Église ? Que peut chaque membre, que peuvent les instances dirigeantes de la communauté locale ? Jusqu’ici, l’Église adventiste s’est trop souvent contentée de condamner l’homosexualité. Ne doit-elle pas approfondir sa réflexion sur ces réalités à la lumière de la Bible ? Au niveau de l’éthique quotidienne, ne doit-elle pas faire face à son devoir d’amour ? Comment accueillir et accepter les personnes, et promouvoir en même temps l’idéal biblique ?
Au cours de son ministère, Jésus a manifesté à tous les êtres humains, particulièrement à ceux qui étaient rejetés et en souffrance, beaucoup d’ouverture, quitte à être, à tort, mal jugé. Il était plus proche de ceux-ci, par exemple des collecteurs d’impôts et des Samaritains, que des bien-pensants qui les méprisaient, car il était la révélation et l’incarnation d’un message de grâce, de vie, de réconciliation, de non-jugement des individus en tant que tels.
À la suite de Jésus, l’Église est appelée à être le lieu de la grâce et de l’accueil. Comment les croyants, rachetés par Jésus et devenus ses frères, peuvent-ils vivre cet esprit d’accueil et les actes positifs qui en découlent ? Des personnes homosexuelles, ardemment désireuses de vivre la foi chrétienne, pourraient-elles le faire dans leur spécificité, non seulement de manière isolée, voire clandestine, mais aussi dans la richesse partagée de la communauté ecclésiale ? Ne serait-il pas souhaitable que ces frères et sœurs en Christ soient respectés et acceptés en tant que personnes ayant un prix infini aux yeux de Dieu ?
Ces questions interpellent. Nul ne peut être forcé dans sa conviction et sa réponse, mais nul non plus ne peut en faire l’économie. Dans ce domaine comme dans tout autre, Jésus demeure le modèle, la référence, comme le conclut la Déclaration officielle de l’Église adventiste : « En tant que disciples
de Jésus, les adventistes du septième jour s’efforcent de suivre l’enseignement et l’exemple du Seigneur en menant une vie de foi et de compassion comparable à celle du Christ (7). »
Commission d’éthique de l’UFB et de la FSRT
Voté par le comité de l’UFB le lundi 11 mars 2013
1. La littérature spécialisée les désigne par les lettres LGBT (lesbiennes, gays, bisexuelles, transgenres).
2. Ce texte, ainsi limité, n’abordera donc pas la question, certes importante, de l’homoparentalité.
3. Que complète un dossier de caractère documentaire contenant notamment des études de textes bibliques, des témoignages, des déclarations officielles et une bibliographie.
4. Matthieu 19.4 : N’avez-vous pas lu que le Créateur, dès le commencement, les fit homme et femme ? (Cf. Genèse 1.26-28)
5. Romains 8.22.
6. À lire, avant toute autre considération, deux ouvrages bouleversants : Kate McLaughlin, Mon fils, cet inconnu que j’aime, Dammarie-lès-Lys, Vie et Santé, 2008 (l’expérience d’une maman dans un milieu adventiste américain) ; Jean-Michel Dunand, Libre. De la honte à la lumière, Paris, Presses de la Renaissance, 2011 (autobiographie dans un milieu catholique engagé français).
7. Déclaration de la Conférence Générale votée le 17 octobre 2012. Voir le texte intégral dans le dossier « Mariage pour tous » de la Revue adventiste de février 2013, p. 16 et 17.